BULLETIN OFFICIEL DES IMPÔTS
DIRECTION GÉNÉRALE DES IMPÔTS
3 I-1-04
N° 87 du 24 MAI 2004
Copropriétés et syndicats d’étalons.
TVA. Champ d’application. Taux. Droits à déduction.
(C.G.I., art. 256)
NOR : ECO F 0430011 J
Bureaux D1 et D2
PRESENTATION
La présente instruction décrit le régime de TVA applicable aux copropriétés et syndicats d’étalons et concerne tant la monte naturelle que l’insémination artificielle.
•
Section 1 :
Présentation des syndicats d’étalons
Les copropriétés ou syndicats d’étalons sont constitués par des personnes (éleveurs ou non de chevaux) qui acquièrent la propriété en commun d’un étalon en vue de son entretien, de la répartition, au prorata de leur quote-part, des saillies que l’animal est en mesure de faire chaque année (entre 40 et 70 en général) et, le cas échéant, de l’organisation et la vente de saillies supplémentaires et de la réalisation de toute autre opération pouvant être utile à l’exploitation de l’étalon (ex : participation à des compétitions).
Ces organismes sont constitués sous la forme d’une indivision conventionnelle ou d’une société en participation[1]. Ils ne sont pas immatriculés au registre du commerce et des sociétés et ne sont pas dotés de la personnalité morale.
L’étalon est représenté par des parts. Chaque porteur de part se réserve la propriété d’un ou plusieurs droits de saillies : en outre, il participe au partage des charges et des recettes résultant des opérations communes.
Les saillies attribuées par le syndicat se répartissent de la manière suivante :
- les saillies individuelles
Ce sont celles qui reviennent de droit à chacun des copropriétaires à raison des parts détenues dans la copropriété. Chaque copropriétaire peut en disposer librement, c’est-à-dire en les utilisant pour faire saillir l’une de ses poulinières ou en les commercialisant auprès de tiers.
- les saillies dites gratuites
Ce sont celles qui sont accordées en contrepartie de certaines prestations rendues à la copropriété (ex : saillie gratuite au profit du haras de stationnement dans lequel l’étalon est mis en pension).
Il peut s’agir également de saillies attribuées sans aucune contrepartie à des organismes professionnels représentatifs des intérêts généraux des éleveurs (ex : syndicat des éleveurs).
- les saillies supplémentaires
Ce sont les saillies commercialisées par le syndicat d’étalons auprès de tiers.
Section 2 :
Règles de TVA applicables aux syndicats d’étalons
Pour ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée (TVA), il convient de considérer que le syndicat d’étalons est doté d’une personnalité propre distincte de celle de ses membres et de son gérant pour les saillies mises en commun (saillies supplémentaires et gratuites), qu’il soit organisé sous la forme d’une indivision ou d’une société en participation.
A. Régime d’imposition
1. Dès lors qu’elles sont indissociables du cycle de croissance des chevaux, les saillies revêtent systématiquement pour l’application des règles de TVA un caractère agricole.[2]
Les syndicats d’étalons relèvent donc du régime de TVA applicable aux exploitants agricoles.
Nota : Les étalons détenus en copropriété peuvent être affectés à la reproduction tout en exerçant une activité de compétition (chevaux de courses et en particulier les trotteurs, ou chevaux de sport). Les gains de courses réalisés par le syndicat constituent des recettes agricoles imposées au taux réduit de la TVA (cf. DB n° 3 I 1133 à jour au 30 mars 2001).
En revanche, les gains de concours hippiques ne sont pas soumis à la TVA.
2. Les syndicats d’étalons sont obligatoirement imposables selon le régime simplifié agricole lorsque le montant moyen de leurs recettes agricoles calculé sur deux années civiles consécutives excède 46 000 euros hors TVA (code général des impôts, art. 298 bis II). L’imposition à la TVA prend effet à compter du 1er janvier de l’année suivante et ce, pour trois années.
Pour l’appréciation du seuil de 46 000 euros les recettes à retenir s’entendent de toutes les sommes encaissées par le syndicat d’étalons, au cours de l’année civile, en contrepartie de ses opérations agricoles (ex : produit des saillies supplémentaires), augmentées de la valeur des saillies dites gratuites déterminée dans les conditions fixées au E.
3. Les syndicats d’étalons qui ne sont pas soumis de plein droit au régime simplifié agricole c’est‑à‑dire qui relèvent du régime du remboursement forfaitaire agricole, peuvent opter pour ce régime dans les conditions prévues à l’article 298 bis III du code général des impôts.
A défaut, ils sont dispensés du paiement de la TVA et des obligations qui incombent aux assujettis.
En revanche, ils ne peuvent pas bénéficier du remboursement forfaitaire agricole à raison des opérations de saillie.
En effet, les saillies sont considérées comme des opérations à façon. Or, les opérations à façon constituent des prestations de services (CGI, art. 256-IV-1°) et n’ouvrent donc pas droit au remboursement forfaitaire agricole[3].
4. Les activités non agricoles réalisées le cas échéant par le syndicat d’étalons sont normalement imposées à la TVA selon le régime général. Elles forment un secteur d’activité distinct au sein de l’activité agricole (cf. ci après, § H).
Toutefois, lorsque ces activités ne présentent qu’un caractère accessoire aux activités agricoles, elles peuvent être rattachées aux activités agricoles imposées selon le régime simplifié agricole.
Elles sont considérées comme accessoires lorsque leur montant total n’excède pas au titre de l’année civile précédente 30 000 euros et 30 % du montant des recettes taxes comprises provenant des activités agricoles (art. 298 III bis du CGI).
Pour l’appréciation du seuil de 30 %, les recettes agricoles s’entendent de celles définies au I.
Bien entendu, la question du rattachement des activités accessoires ne se pose pas s’il s’agit de prestations de services dont les recettes n’excèdent pas le seuil de la franchise en base de 27 000 euros (art. 293 B à 293 G du CGI). En effet, cette franchise dispense de la déclaration et du paiement de la TVA sur ces opérations.
B. Opérations SOUMISES A LA TVA
Toutes les opérations suivantes réalisées par le syndicat avec des tiers sont soumises à la TVA.
1. Les saillies supplémentaires :
Il s’agit de prestations de services effectuées à titre onéreux qui sont normalement imposables à la TVA.
2. Les saillies dites gratuites :
2.1. Sont imposables les saillies réalisées sans rémunération mais qui sont en fait la contrepartie d’une prestation de services rendue à la copropriété. Dans ce cas, l’opération s’analyse comme un échange de services dont chaque terme doit être soumis à la TVA.
2.2. En application du 2 de l’article 257-8° du CGI, les syndicats d’étalons doivent procéder à l’imposition à la TVA des prestations de services à soi-même correspondant aux saillies attribuées à des tiers au syndicat d’étalons, sans aucune contrepartie, dès lors que :
- ces saillies sont rendues à titre gratuit à des fins étrangères au syndicat d’étalons ;
- et que les biens et moyens utilisés pour rendre ces prestations ont ouvert droit à déduction totale ou partielle de la TVA. Tel est le cas notamment des frais d’entretien et de pension des étalons qui ouvrent droit à déduction pour le syndicat dans les conditions précisées au H.
3. Les gains de courses (cf. supra A‑1)
C. Opérations non imposables a la tva
Ne sont pas imposables à la TVA chez le syndicat :
1) les saillies qui reviennent de droit à chacun des copropriétaires (saillies individuelles)
En revanche, chaque copropriétaire impose à la TVA les sommes perçues des tiers en contrepartie de ces saillies (cf. section 3, A).
2) les mouvements financiers internes au syndicat d’étalons effectués dans le cadre du contrat de société et conformément aux conventions conclues entre les parties.
Tel est le cas des mouvements financiers relatifs à la répartition des dépenses (prix de pension, frais d’entretien de l’étalon…) ou à l’attribution des bénéfices ou des pertes.
D. Territorialité
Les saillies, opérations à façon, sont des prestations de services sur biens meubles corporels dont les règles de territorialité ont été définies dans une instruction du 28 septembre 1997 (BOI 3 A‑5‑97) à laquelle il convient de se reporter.
Il en résulte notamment que les saillies sont imposables lorsqu’elles sont situées en France, c’est-à-dire lorsqu’elles y sont matériellement exécutées.
Par dérogation à ce principe, le lieu de saillies rendues à un preneur identifié à la TVA dans un autre Etat membre de la Communauté européenne est situé sur le territoire de l’Etat membre qui a attribué au preneur le numéro d’identification sous lequel le service lui est rendu, à condition que la jument quitte le territoire français après la saillie.
En conséquence, le lieu des saillies est réputé se situer en France dans les cas suivants :
a) saillie réalisée en France
- absence de numéro d’identification à la TVA du preneur dans un autre Etat membre de la Communauté européenne (CGI, art. 259 A‑4°‑bis‑a) ;
- numéro d’identification à la TVA du preneur dans un autre Etat membre de la Communauté et absence de transport de la jument hors du territoire national après la saillie (CGI, art. 259 A‑4°‑bis‑a).
b) saillie réalisée hors de France
- numéro d’identification à la TVA du preneur en France et transport de la jument hors du territoire de l’Etat où a été exécutée la saillie (CGI, art. 259 A‑4°‑bis‑b). Il n’est pas nécessaire que la jument soit transportée à destination de la France.
E. Base d’imposition
1. Les saillies supplémentaires
La base d’imposition est constituée par toutes les sommes, valeurs, biens ou services reçus ou à recevoir en contrepartie des saillies (article. 266‑1‑a du CGI).
2. Les saillies dites gratuites attribuées en contrepartie d’un service rendu à la copropriété (cf. section 2, B, 2-1).
La base d’imposition est normalement constituée par le prix du marché.
Toutefois, il est admis que le prix retenu au titre de ces saillies soit égal à :
- 65 % du prix du marché si le prix de la saillie est stipulé « jument pleine au 1er octobre » ;
- 60 % du prix du marché si le prix de la saillie est stipulé « foal vivant »[4].
3. Les saillies initialement gratuites (cf ; section 2, B, 2-2).
Il est rappelé que ces saillies donnent lieu à l’imposition à la TVA des prestations de services à soi‑même taxables à la TVA dans les conditions exposées supra (cf. section 2, B, 2).
L’article 266‑1‑c du CGI prévoit que la base d’imposition des prestations de services à soi‑même est constituée par les dépenses engagées pour leur exécution, c’est‑à‑dire par le prix de revient du service.
En pratique, la base d’imposition des prestations de services à soi-même correspond à la valeur hors TVA des biens autres que les immobilisations, et des services, nécessités pour la réalisation de la prestation, et qui ont ouvert droit à déduction totale ou partielle au titre de la TVA acquittée en amont (BOI 3 CA 94 § 195).
Cette base est augmentée de l’amortissement linéaire de l’étalon correspondant à la durée d’utilisation de celui-ci à des fins étrangères à la copropriété ou au syndicat d’étalons. Cette durée d’utilisation est en pratique donnée par le rapport entre le nombre de saillies gratuites et le nombre total de saillies.
F. FAIT GENERATEUR, Exigibilité
1. Fait générateur :
Le fait générateur des saillies est constitué par leur réalisation.
2. Exigibilité :
La TVA due à raison des saillies est exigible lors de l’encaissement des acomptes ou du prix. Toutefois, le syndicat peut être autorisé à acquitter la TVA d’après les débits.
Précision : pour les saillies gratuites contreparties d’un service, l’exigibilité de la TVA intervient à la date d’exécution du service.
Pour les saillies gratuites devant donner lieu à l’imposition d’une prestation de services à soi‑même, l’exigibilité intervient lorsque la saillie est effectuée (CGI, annexe II, art. 175).
G. Taux
Les saillies sont considérées comme des travaux à façon portant sur des produits agricoles non transformés. Elles bénéficient donc du taux réduit de 5,5 % de la TVA (CGI, art. 278 bis-3°).
H. Droits à déduction
Le syndicat exploite l’étalon, copropriété de ses membres, soit au sein d’une indivision, soit au sein d’une société en participation.
Dans les deux hypothèses, les opérations liées à cette exploitation qui sont réalisées au sein du syndicat doivent être érigées, en application de l’article 213 de l’annexe II au CGI, en un secteur d’activité distinct des activités propres des membres du syndicat ou de son gérant.
Le syndicat d’étalons exerce au sein du secteur distinct d’activité ainsi constitué et dans les conditions de droit commun le droit à déduction de la TVA afférente à l’ensemble des biens et services nécessaires à l’exploitation conjointe de l’étalon sous réserve des précisions apportées ci‑dessous (section 3).
L’imposition à la TVA des prestations de services à soi‑même correspondant aux saillies dites gratuites lui permet notamment de récupérer la totalité de la TVA grevant ses dépenses de pension et d’entretien de l’étalon.
En revanche, la TVA exigible au titre de l’imposition des prestations de services à soi-même n’est jamais déductible par le syndicat.
I. Obligations
1. Facturation
L’article 289 du CGI fait obligation à tout assujetti à la TVA qui livre des biens ou rend des services à un autre assujetti ou à une personne morale non assujettie de lui délivrer une facture.
Cette obligation de facturation s’applique notamment aux ventes de saillies supplémentaires, aux saillies dites gratuites attribuées en contrepartie de prestations de services rendues au syndicat.
Les mentions qui doivent figurer sur les factures sont celles exigibles en application du droit commun (CGI, annexe II, art. 242 nonies A).
En raison des usages particuliers de l’agriculture, il est toutefois admis que les clients du syndicat d’étalons puissent rédiger matériellement les factures que ces derniers doivent établir. Les conditions requises figurent à la documentation de base DB 3 I 1353.
2. Déclaration des opérations réalisées et paiement de l’impôt.
Les opérations réalisées par le syndicat sont en principe déclarées par l’un des copropriétaires désigné de la société en participation ou de l’indivision, en même temps que ses propres affaires.
Toutefois, dès lors que les activités du syndicat ont un certain caractère de permanence, la souscription d’une déclaration séparée regroupant les seules opérations du syndicat est possible.
Il appartient au copropriétaire désigné de souscrire au nom du syndicat une déclaration d’existence et de déposer les déclarations de TVA sur lesquelles il détermine la TVA afférente aux opérations réalisées par le syndicat au titre de l’exploitation de l’étalon. Il peut également solliciter, suivant les procédures de droit commun, la restitution des crédits de TVA non imputables qui, le cas échéant, seront dégagés (CGI, annexe II, articles 242 0 A et suivants).
Le syndicat doit se conformer aux obligations prévues aux articles 298 bis et 1693 bis du CGI.
Il doit ainsi souscrire avant le 5 mai de chaque année une déclaration indiquant le détail des opérations taxables et les éléments de liquidation de la TVA pour les opérations réalisées l’année précédente (imprimé 3517 bis M CA 12 A). La TVA est acquittée par acomptes trimestriels égaux au moins au cinquième de l’impôt dû au titre de l’année précédente.
Section 3 :
Régime de TVA des copropriétaires
Les copropriétaires, membres du syndicat d’étalons, peuvent être des particuliers, des professionnels tels que des exploitants agricoles redevables ou non de la TVA.
Il est rappelé qu’ils ne sont pas soumis à la TVA au titre de la répartition des bénéfices réalisés au sein de la société en participation ou de l’indivision dès lors que cette répartition constitue une opération interne.
Pour les copropriétaires ayant la qualité d’exploitant agricole, leur quote‑part dans le bénéfice n’est pas prise en compte pour l’appréciation du seuil de 46 000 euros au-delà duquel ils relèvent obligatoirement du régime simplifié agricole.
Il est rappelé que les sommes perçues en contrepartie des saillies individuelles ou des cessions d’un droit à l’exécution de la saillie entrent dans la base d’imposition à la TVA des porteurs de parts propriétaires des droits de saillies individuelles.
Ces saillies bénéficient du taux réduit de la TVA dans les conditions prévues au G.
Les copropriétaires peuvent, à ce titre, opérer la déduction de la TVA afférente, le cas échéant, à la quote‑part des dépenses dont le remboursement leur a été réclamé par le syndicat d’étalons.
La justification de ce droit à déduction suppose, bien entendu, la reddition de compte aux copropriétaires et la justification de la nature et du montant exact des débours.
Bien évidemment, le syndicat n’exerce lui‑même aucun droit à déduction de la taxe afférente, le cas échéant, aux dépenses ainsi remboursées par les copropriétaires.
La Directrice de la Législation Fiscale
Marie-Christine LEPETIT
[1] Le régime fiscal des copropriétés d’étalons est précisé dans la documentation de base 4 A 2314 du 9 mars 2001, complétée par le BOI 4-A-10-03 du 29 juillet 2003.
[2] Il est rappelé qu’en matière d’impôts directs, l’activité de reproduction non rattachée à une exploitation agricole relève par nature de la catégorie des bénéfices non commerciaux sauf si les droits indivis sont inscrits à l’actif d’une entreprise industrielle ou commerciale ou d’une exploitation agricole, les profits relevant alors, selon le cas de la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux ou de celle des bénéfices agricoles.
[3] Seules les ventes ou les livraisons de produits provenant des activités agricoles et réalisées à destination de tiers ouvrent droit au remboursement forfaitaire agricole.
[4] Au sens de la réglementation des courses, l’âge des chevaux est compté par année civile quelle que soit la date de leur naissance dans l’année. Ils ont donc « un an » dès le 1er janvier de l’année qui suit celle de leur naissance. Les poulains sont appelés « foals » jusqu’au 31 décembre de leur année de naissance.